Evocation de Montesquieu à Saint Morillon, en l'église, à Lusié, la Flouquette, Plantat et Le Carat

On évoquera Montesquieu en divers endroits à Saint Morillon par SIGM

 

en l'église la Litre

Lusié et son moulin

le Carat et son moulin

la Flouquette

Plantat

* Montesquieu à Saint Morillon

Depuis le XI siècle, le village de Saint-Morillon était coupé en deux, par le ruisseau Gât Mort, certes, mais surtout par son appartenance à deux seigneuries différentes : Rive Gauche, c’est la famille des Lalande, seigneurs de La Brède, (dont est issue Marie Françoise de Pesnel, mère de Montesquieu ) et Saint Morillon de Barsac, rive droite. Il est acheté en 1746 par Montesquieu, préoccupé d’agrandir son patrimoine, qui disait    « Je n’ai cessé d’augmenter mon bien, j’ai fait de grandes améliorations à mes terres….plutôt pour une certaine preuve d’habileté que pour devenir riche, je n’ai pas voulu faire ma fortune par les faveurs de la cour ». On trouve trace chez les notaires d’un grand nombre de fermes, de biens détenus par achats, échanges. Quelques noms sont évocateurs : … à Saint Morillon, la maison noble Lusié-Darriet (près de l’ancien moulin), la métairie de Calente. Les sites ont bien changé depuis, seuls quelques noms restent.

1747 : les deux Saint Morillon sont enfin réunis par lettres patentes du roi, et tous les habitants ont alors les mêmes juge, tribunal et prison….Cependant, il faudra attendre 83 ans après la mort de l’écrivain pour que cette réunification politique soit matérialisée par un PONT. Il sera construit, d’une seule arche ; vous empruntez ce pont, toujours là, 170 ans après, un peu étroit certes puisqu’il n’est qu’à 1 seul sens . texte de Joseph Boyreau

 

 

* le moulin de Lusié

 

Ce moulin a été acheté par Montesquieu le 30 juillet 1754, à peu près sept mois avant sa mort, au seigneur Armand de Montferrand, marquis de Landiras, pour la somme de 11 000 livres. Il s'agissait, d'après l'acte d'achat, d'une maison noble avec moulin à eau à deux meules ; bois, taillis et terres. Les meules ne sont plus visibles. ( Joseph Boyreau )

Le cadre est pittoresque, avec un virage ensablé du ruisseau (baignade interdite) près des chutes d’eau. Le téléfilm " Monsieur Léon " (épisodes de la résistance locale de 1941 à 1945) a été tourné sur ce site de Lusié et diffusé sur TF 1 le jour du décès de son principal interprète : MICHEL SERRAULT .

 

* le moulin du Carat (ou Moussurot)

Historique : Peu de choses à dire en l’état de nos connaissances.

Connu plus anciennement sous les noms de Moulin du Carat ou de Jean Bertrand, nous ignorons (comme pour la majorité de ce type d’ouvrages) sa date d’origine. Mentionné (comme tous les autres moulins dont on connaît les restes sur le Gât Mort) sur la carte de Belleyme (XVIIIèS), rien n’empêche de dire que le site a été occupé au Moyen Âge, rien ne permet de l’affirmer.

On sait qu’il fit partie des biens de Montesquieu qui, en 1746, racheta le moulin aux de Litteris, seigneurs de Saint-Selve, en même temps qu’il leur rachetait les droits seigneuriaux pour la partie rive droite de Saint-Morillon.

pour en savoir plus, voir " parlez moi de Moussurot "

 

 

* domaine de la Flouquette, site classé

 

 

 

 

 

* le domaine de Plantat

texte d'un exposé par CEG et anecdote écrite par Philippe Delpech

 

Texte de l’exposé devant des élèves de 1° S du Lycée Montesquieu de Libourne, devant un groupe d’anciens de la BTP, en 2011 et devant d’autres groupes les années antérieures.

par Christiane Espeut Guillemot ; environ 20 minutes ;

Aujourd’hui, ici, à Saint-Morillon, au château Plantat, vous êtes chez Mme Irène Labarrère. Mais, en 1750, vous auriez été reçus par Montesquieu sur ses terres, dans une propriété nouvellement acquise, un pavillon de chasse acheté en même temps que les quelques 1500 hectares constituant la moitié de Saint-Morillon qu’il ne possédait pas encore. En effet, ce village était coupé en deux par son appartenance à 2 baronnies différentes, depuis 7 siècles. La séparation était faite aussi par le ruisseau Gât Mort (qui se jette dans la Garonne) et il n’y avait pas encore le pont qui sera construit en 1848. On traversait à gué ou bien en cas de fortes eaux, on devait faire le tour par Beautiran. C’est en 1946 que Montesquieu achète au baron de Landiras cette partie de Saint Morillon et la rattache à ses nombreuses possessions. Montesquieu était un seigneur féodal tout puissant, ses possessions s’étendaient sur 25 communes ; on en a trouvé de nombreuses traces chez les notaires après sa mort. Cette réalité a conduit l’association SIGM à déposer à l’INPI la marque « La Route de Montesquieu ». C’est un fil d’Ariane pour découvrir, animer, restaurer le patrimoine.

Un contemporain a pu dire : « Il n’est pas une touffe d’herbe qui n’appartienne à Monsieur de Montesquieu». Ce dernier disait : « Je n’ai cessé d’augmenter mon bien, pour faire preuve d’habileté plutôt que pour m’enrichir. » Montesquieu était baron de La Brède, et la baronnie s’étendait sur les trois communes de La Brède, Martillac et Saint-Morillon. Cette réalité foncière englobe aussi, dans le titre de baron, les droits de justice sur plusieurs terroirs et des droits honorifiques. Dont en particulier le droit de LITRE, c'est-à-dire le droit d’avoir, après la mort, une large bande noire sur les murs d’une église. C’est donc le cas en l’église de Saint-Morillon, la bande noire a été recouverte de plusieurs couches de badigeon, mais les armoiries de

Montesquieu sont encore visibles sur le mur Ouest, restaurées récemment après avoir été découvertes de façon fortuite. (photo)

Le personnage est passé à la postérité sous le nom de Montesquieu, mais ses noms et titres complets sont : « Charles Louis de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu, président à mortier au Parlement de Bordeaux ».

Montesquieu disait : « il faut avoir étudié beaucoup pour savoir peu ». Eh bien, comme je n’ai que peu étudié, je ne sais pas grand-chose ! (dit la commentatrice)

Maurice Duverger, Professeur à l’Institut des Etudes Politiques, disait en 1948 : « On parle beaucoup de Montesquieu, mais on l’étudie peu ! » Il suscite l’ennui chez les lycéens…et les autres !

Secrétaire du SIGM, je me contente donc de vous en parler de façon anecdotique.

Il est né à La Brède en 1689, au château, mort à Paris en 1755, enterré dans la paroisse Saint-Sulpice, on ignore où se trouve sa sépulture ; celle de ses parents se trouvant en l’église de La Brède .

Si en 1789, le fief de Montesquieu a été enlevé à ses descendants, on trouve encore des traces des Montesquieu à La Brède. La dernière propriétaire du château, décédée en 2004, sans descendance a créé la Fondation Jacqueline de Chabannes aux nombreux projets. Château et parc sont maintenant classés aux Monuments Historiques (en 2007 et 2008).

Ce château féodal, datant de 1306, a 17 pans, 3 ponts-levis ; des douves l’encerclent, alimentées par La Sesque, petit ruisseau. Peu de châteaux en France conservent encore leurs douves. Il a même été copié … en Ecosse (voir site Internet SIGM). Le château se visite, pensez –y ! Il est émouvant de voir l’usure de la cheminée due au frottement du pied de Montesquieu, lorsqu’il dictait ses œuvres à ses secrétaires.

Montesquieu a beaucoup habité en son château de La Brède, un peu à Bordeaux et à Paris. Il a beaucoup voyagé en Europe. Il disait "vous me parleriez de l’Europe, moi je vous parlerai de mon village de La Brède. C’est le plus beau lieu que je connaisse" "La Nature s’y trouve dans sa robe de chambre au lever de son lit".

Il est donc né au château en janvier 1689. On le baptise le jour même, malgré la froidure. Etait-ce parce que l’Edit de Nantes vient d’être révoqué en 1685 ? La famille de Jeanne de Pesnel avait bien quelques ancêtres protestants.

Son parrain est un mendiant appelé Charles « afin qu’il lui rappelle toute sa vie que les pauvres sont ses frères », écrit sa marraine, sur son livre d’heures.

Qu’en a-t-il retenu ? « Il ne faut pas qu’on manque du nécessaire quand j’ai du superflu » dit- il lors des terribles famines, en ouvrant ses greniers. Car c’était une époque de disettes terribles. 1709 a connu une terrible famine ; le vin gelait dans les barriques ; on essayait de moudre des glands, de l’avoine sauvage , du lupin, pour faire du pain … et aussi ces petits grains de blé sauvage appelés en Provence « espeut » (voyez l’allusion à mon nom !) qu’on appelle maintenant épautre, le pain d’épautre existe mais la graine est mieux cultivée qu’autrefois.

Il faut dire qu’on préférait arracher le blé pour planter de la vigne. Montesquieu disait lui-même : « Il vaut mieux produire du bon blé en Beauce et du bon vin à Bordeaux, pour que les bordelais mangent du bon pain et que les beaucerons puissent étancher agréablement leur soif ». Planter de la vigne était une idée fixe ; on vendait du vin même aux musulmans, sous l’appellation « eau de Carbonnieux », des barriques partaient sur des bateaux depuis le château Malleret, en bord de Garonne (classé, se visite), en direction de la Turquie ; ce qui faisait dire au sultan « Quand ils ont une eau aussi agréable à boire, pourquoi les Français s’obstinent ils à produire du vin ? »

Dès 1730, Montesquieu reçoit les foudres du pouvoir royal, qui redoute que la mutation des zones céréalières en vignobles ne déclenchent des disettes, cause de nombreux troubles sous le règne de Louis XIV. Un arrêt de juin 1731, portant « l’interdiction de plantations nouvelles dans toute l’étendue du royaume, sous peine de 50 livres d’amende » sera abrogé en 1759, soit 4 ans après la mort de Montesquieu.

Les dragons ont ordre d’arracher les vignes. Qu’à cela ne tienne, Montesquieu s’entête et replante. La brouille avec le pouvoir dure longtemps mais finalement, Louis XV cède et tranche en faveur de Montesquieu, grâce au Duc de Richelieu, son surintendant des Menus Plaisirs. Ce gouverneur de Guyenne était un sacré libertin au point qu’on a pu appeler le vin de Graves « la tisane de Richelieu ».

Ses vignes se trouvaient à Martillac, au domaine de Rochemorin, actuellement propriété d’André Lurton. Mais s’il aimait par dessus tout s’occuper de ses vignobles, c’était un marchand de vin fort avisé et il commercialisait son vin sous le nom de « vin de La Brède », trouvant sans doute cette appellation « plus porteuse » que « vin de Martillac ». Il disait aussi : « Je ne sais si c’est mon vin qui fait connaître mes écrits, ou l’inverse ».

Revenons en 1689, après sa naissance. Il est tout de suite placé en nourrice, à 2 kilomètres du château de ses parents, chez une meunière où il restera pendant 3 ans. (la commentatrice place ici une ou 2 réflexions sur la façon d’élever les enfants aujourd’hui). Une plaque commémorative en céramique a été apposée en 1969 par les soins de l'Académie Montesquieu sur un mur du moulin à La Brède, et restaurée par SIGM.

Un précepteur s’occupe de son éducation ensuite. Il perd sa mère à l’âge de 7 ans, lors de la naissance d’une petite sœur. « Elle n’a pas eu le temps de m’apprendre toutes mes prières », dira- t- il au Collège de Juilly, aux Oratoriens chargés de son éducation.

En 1696, son père hérite du domaine de La Brède, apporté en dot par Jeanne de Pesnel, sa mère.

En 1713, à 24 ans, à la mort de son père, il devient baron de La Brède, les autres enfants du couple étant entrés en religion ; cette vaste terre de La Brède, Saint Morillon, Martillac, s’étendant sur 3 communes actuelles, qui vient des ancêtres Lalande donne bien des difficultés concernant ses limites de propriété, malgré le bornage. Toute une littérature y est consacrée, Montesquieu était un procédurier, à 21 ans il avait acquis le diplôme d’avocat.

On trouve encore certaines bornes des limites des domaines. L’une d’entre elles se trouve en face de la technopole à Martillac. Elles sont en calcaire sableux, d’origine marine, du calcaire à astéries, de 30 millions d’années avec des débris d’oursins, d’étoiles de mer ; n’oublions pas que nous sommes à Plantat , site géologique que vous allez visiter (et faire des fouilles vous mêmes).

D’un côté des bornes, le croissant de lune du Comté d’Ornon, indique la direction de la ville de Bordeaux, de l’autre le L des Lalande indique les possessions de Montesquieu .Un procès sur les limites de ses possessions a occupé Montesquieu de 1726 à 1743, les bornes étaient déplacées sans cesse …

En 1715, Montesquieu a 26 ans, il épouse Jeanne de Lartigue, l’histoire dit qu’elle boitait et qu’elle n’était pas jolie, mais on dit aussi qu’elle avait une dot de 100 000 livres. C’est une noblesse récente, Pierre de Lartigue a été anobli sous Louis XIV. C’est au domaine de Lartigue à Martillac que se trouve encore le tilleul qu’a connu Montesquieu, qui a donc plus de 3 siècles. Le mariage a lieu en toute discrétion en l’église Saint Michel à Bordeaux car Jeanne de Lartigue est calviniste, et à cette époque, il faut un certain courage pour conclure un mariage mixte. L’homme est en effet passible des galères, et l’épouse prend le risque de finir ses jours à l’hôpital. Les galères ne seront supprimées qu’en 1748.

Comme tous les aristocrates de l’époque, il a eu des maîtresses. Certaines attitudes nous choquent, exemple, lors d’une visite à sa maîtresse bordelaise, il a laissé sa femme légitime « poireauter » 2 heures en bas dans la voiture.

En 1716, à 27 ans, Charles Louis de Secondat, Baron de La Brède, devient baron de Montesquieu, au décès sans descendance de son oncle Jean Baptiste. La commune de Montesquieu, en Lot et Garonne, est actuellement le siège du verger-musée conservatoire d’Aquitaine .Il y a 8 communes en France qui s’appellent Montesquieu, mais 1 seule correspond à la baronnie de l’écrivain.

Il hérite en même temps de la charge de Président à mortier (c’est une coiffure, une sorte de bonnet) du Parlement de Bordeaux.

En 1716, aussi naît son premier enfant, prénommé Jean Baptiste, comme l’oncle défunt.

Et c’est justement Jean Baptiste que nous retrouvons, ici, à Plantat, dont il hérite en 1755 à la mort de son père ; et c’est la dernière anecdote de cette histoire :

Un certain André Subervie, roturier, utilisait une pièce de bois, mais ne s’était pas plié à l’usage, c'est-à-dire rendre hommage au suzerain .Après menaces, il doit s’exécuter et on en retrouve trace dans un texte . En 1775, « genou en terre, tête nue, sans gants, épée, bottes, éperons, il jure fidélité au seigneur ».Il doit même exécuter le « baiser de bouche »en signe d’allégeance !

Cette tradition entre nobles imposée à un roturier surprend, par le fils de celui qui a préconisé les grands principes qui on été à la base de la Révolution de 1789.

Saint Morillon

Montesquieu à Plantat : anecdote sur Jean Baptiste de Secundat, fils de Montesquieu

Lorsqu’on accède à « Château Plantat » par l’allée, à première vue, l’allure générale est caractéristique du style en vogue dans les années 1930-1940 mais l’organisation des lieux, quelques éléments architecturaux et quelques documents montrent bien que les travaux effectués à cette époque ont surtout modifié l’apparence de bâtiments plus anciens. La carte de Belleyme (XVIIIème) atteste la présence de deux établissements distincts, comme le cadastre de 1846. Sous l’Ancien Régime, Plantat relevait de la Maison Noble de Luzier ou de la Motte Darriet. Il est établi que, depuis au moins le XVIème, cette Maison Noble était une dépendance de la baronnie de Landiras, propriété de la famille de Montferrand. Et, cela, jusqu’au 30 juillet 1754 lorsque Charles de Secondat, Baron de La Brède, fit l’acquisition de François Armand de Monferrand, Marquis de Landiras, des droits seigneuriaux et de droits de propriété sur la Maison Noble de Luzier. En 1811, les Montesquieu étaient toujours propriétaires de terres à Plantat, comme à Calenta et au moulin de Luzier. Une terre relevant d’un seigneur est une chose qui va de soi sous l’ancien régime ; lorsque ce seigneur s’appelle Montesquieu cela est déjà moins banal. Une anecdote attachée à Plantat contribuera elle aussi à tirer ces lieux de l’anonymat historique. Dans les années 1770, un André Subervie, marchand, habitant de Saint-Selve possède à Plantat « une pièce de bois taillis de petite contenance ». Le fils de Montesquieu, Jean-Baptiste de Secondat, réclame à Subervie « l’hommage » qu’il lui doit au titre des règles féodales. Devant le peu d’empressement de Subervie à s’exécuter, Jean-Baptiste de Secondat le menace « de faire procéder par saisie féodale sur la dite pièce », c'est-à-dire de le déchoir de ses droits de propriété (après dédommagement toutefois) comme l’y autorisent les droits seigneuriaux. Devant la menace, André Subervie se plie, le 14 janvier 1775, à cette procédure d’un autre âge : « Devant le dit Seigneur de Secondat le dit Subervie a mis un genou à terre, tête nue, sans gants, épée, botte, éperon et, en cet état, a promis et juré au seigneur la foi et fidélité qu’il lui doit ». Après que Subervie ait « offert le baiser de bouche », le seigneur l’a « pris par la main et fait lever et lui a promis la protection secours et garantie que tout seigneur doit à son vassal ». Cette forme très traditionnelle de l’acte d’allégeance est celle qui liait au Moyen Age le suzerain et le vassal noble. L’imposer à un « marchand » donc a priori à un roturier et pour une modeste pièce de bois taillis…, cela a de quoi surprendre, surtout à moins de 15 ans de la Révolution, de la part du fils de Montesquieu, car le père étant reconnu comme ayant « préconisé les principes qui ont été à la base de la Révolution de 1789 » (cf. Encyclopédie Quillet), une question se pose : la leçon a-t-elle été bien assimilée par le fils ?

Philippe Delpech

 

 

 

 

 

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