Texte de Mme Hélène Brun-Puginier (2007)
33850 Léognan
photo (portrait de M. et Mme Mareilhac) extraite de l'ouvrage " Histoire de Léognan" par la Fédération Historique du Sud Ouest sous la direction de Jean Claude Drouin
Le domaine de La Louvière comptait autrefois deux moulins sur l'Eau Blanche : le moulin de la Blancherie (ou Blanchisserie) servant à laver le linge ou hébergeant des fabriques d'indiennes -tissu de coton imprimé souvent de couleur rouge- au XVIIIe et le Moulin Vieux .
Pour leur histoire, vous pouvez vous reporter à l'histoire de l'ensemble du domaine.
Ces moulins étaient en général affermés par les seigneurs de la Louvière à des paysans locaux ou à des meuniers.
En 1656, par exemple le Moulin Vieux est affermé à Janton Bernède pour deux années avec obligation pour ce dernier de payer chaque année (en nature) aux seigneurs desdits lieux: 25 boisseaux de seigle, 3 paires de gélines (poules) et une centaine d'oeufs. Ces baux à ferme étaient passés chez le notaire de Léognan.
En décembre 1658, ce moulin était à nouveau affermé par contrat passé chez Me Lafeychine, notaire royal de Léognan au même individu pour une durée de 3 ans moyennant 30 boisseaux de seigle; 3 paires de poules, cent oeufs et à la charge aussi de moudre sans aucun droit quinze boisseaux de blé (pour le seigneur) ....
L'activité des moulins variait en fonction de l'économie. A Léognan, la vigne a très tôt occupé une place prépondérante dans l'agriculture. Les vins qui y étaient produits furent reconnus pour leurs qualités dès l'époque anglaise. Les clients étaient nombreux et la spéculation allait bon train. Les surfaces réservées aux grains en général étaient assez restreintes. Le seigle était souvent plus cultivé que le blé/ froment. La pauvreté des sols est aussi à l'origine d'une telle situation.
Les sols de graves ne sont pas des sols très fertiles. La vigne s'adapte plus facilement sur ces terroirs, sans apport d'engrais. Les cultures céréalières sont au contraire beaucoup plus gourmandes.
Autrefois jusqu'à la période phylloxérique -1875, on trouvait en Gironde et notamment à Léognan un mode culture bien particulier: les joualles.
Ces joualles permettaient de cultiver à la fois des céréales ou des légumes et de la vigne.
Entre deux rangs de vignes (beaucoup plus espacés qu'aujourd'hui), on trouvait des platesbandes réservées aux grains ou aux légumes.
En fonction de la pénurie ou non de blé, des périodes de disette, les surfaces emblavées étaient plus ou moins privilégiées ...
Histoire du Château La Louvière
En l'an de grâce 1476, la forêt parcourue par des hordes de loups occupait la quasi-totalité de la paroisse de Léognan. Mais, au lieu-dit «La Lobeyra» (La Louvière), l'homme avait défriché une vaste clairière et s'était lancé dans la grande aventure viticole. La production était à cette époque encore réduite, de l'ordre de quelques dizaines de barriques, mais la qualité des vins produits était déjà reconnue. La famille de Guilloche, d'ancienne bourgeoisie anoblie par les charges, présidait alors à la destinée de ces lieux, depuis 1398. Son implication dans la vie politique de la cité bordelaise, au sein du Parlement, fut indéniable et ce pendant
plus de deux siècles.
Entre 1510 et 1550, Pierre de Guilloche, puis son fils Jean, se lancèrent dans de vastes opérations foncières : achats, échanges de parcelles se succédèrent. Ces importants remembrements autour de la maison noble de La Louvière, semblable alors à un modeste castel orné de plusieurs tours, furent à l'origine du domaine que nous connaissons aujourd'hui.
En cette première moitié du XVIe siècle, à l'instar de la famille de Guilloche, plusieurs parlementaires bordelais donnèrent naissance aux grands crus actuels. De confession protestante, les Guilloche endurèrent plusieurs vagues de persécutions dans les années 1572 et leur bien de La Louvière fut, à maintes reprises, mis à sac.
Héritière de la maison de Guilloche, la dame de Roquetaillade vendit la Louvière en 1618 à Arnaud de Gascq, abbé commendataire de l'abbaye de Saint-Ferme.
Mais, incapable de remettre en état cette propriété, ce dernier en fit don le 28 avril 1620 à la Chartreuse Notre-Dame de Miséricorde de Bordeaux. Tous les soucis de restauration du domaine et de son exploitation reposaient désormais sur les moines de la Chartreuse. La grande rigueur de cet ordre religieux et une gestion des plus méticuleuses vinrent rapidement à bout de la plupart des problèmes rencontrés jusqu'alors. La Louvière revivait enfin !
Bénéficiant en ce début du XVIIe siècle d'une conjoncture particulièrement favorable au développement de l'activité viticole, nos religieux apportèrent une attention toute particulière au vignoble. Dans les chais, tonneliers et maîtres de chais ne ménageaient pas leurs efforts et prodiguaient les meilleurs soins aux vins blancs et rouges, très prisés des marchands picards, anglais et flamands. Chaque année, plusieurs dizaines de barriques de vin rouge de La Louvière étaient ainsi embarquées sur des navires en direction de l'Angleterre ; les blancs partaient vers le Nord de l'Europe. Au XVIIIe siècle, les vins produits par les Chartreux étaient parmi « les plus excellents qu'on puisse boire dans tout le royaume ».
Maîtres de la Louvière pendant près de deux siècles, les Chartreux en furent dessaisis au moment de la tourmente révolutionnaire.
En novembre 1789, l'Assemblée Nationale confisqua les biens du clergé. Déclaré «Bien national» , le domaine de La Louvière fut mis en vente au printemps 1791. Le vignoble s'étendait alors sur une quarantaine d'hectares. Les enchères furent remportées par un négociant bordelais, Jean-Baptiste Mareilhac. A la tête d'une des maisons de négoce les plus prospères de Bordeaux, Jean-Baptiste connaissait bien La Louvière dont il exportait une partie des vins vers Saint-Pétersbourg. Cette propriété était donc pour lui un très bon investissement.
Mais une seule chose manquait encore à son bonheur : une demeure digne de sa jeune épouse Jeanne-Emilie. Pour cette grande entreprise, il fit appel à un architecte de renom, François Lhôte, ancien élève de Victor Louis, auteur du Grand Théâtre de Bordeaux. La vieille maison et ses vestiges moyenâgeux laissèrent la place à une belle bâtisse dans le plus pur style néoclassique.
Pour la décoration intérieure, il sollicita un de ses amis, François-Louis Lonsing, peintre d'origine flamande de grand talent. Celui-ci réalisa les grisailles et les plafonds du salon rotonde sur le thème des amours de Psyché. Mais victime d'un empoisonnement dû au maniement de pigments toxiques, cet artiste ne put achever ses travaux et mourut à La Louvière au printemps 1799.
La nouvelle demeure fit l'admiration de tous. En 1946, le site fut inscrit à l'Inventaire des Monuments Historiques et fut classé en 1996.
La famille Mareilhac présida à la destinée du domaine pendant une grande partie du XIXe siècle. Alfred Mareilhac, petit-fils de Jean-Baptiste hissa le vignoble de La Louvière parmi les vignobles les mieux tenus du département et obtint pour ces fabuleux résultats une « médaille d'or» décernée par le Ministère de l'Agriculture en 1869.
En 1911, Alfred Bertrand-Taquet, parisien d'origine, actionnaire de la « Revue Vinicole» acheta le domaine et en assura la gestion jusqu'en 1944. Il fut élu maire de Léognan en 1919 et le resta jusqu'au lendemain de la seconde guerre mondiale. Victime de l'absentéisme de ses propriétaires, la Louvière joua par la suite, les belles endormies pendant plus de quinze ans.
Enfin, en 1965, André Lurton, viticulteur originaire de Grézillac tomba sous les charmes de La Louvière et s'en rendit acquéreur. Les années qui suivirent, virent ce domaine retrouver peu à peu son prestige d'antan... La demeure et les chais furent entièrement restaurés et le vignoble reconstitué ...
La Louvière le parc et le château
En l’an de grâce 1476, la forêt parcourue par des hordes de loups occupait la quasi-totalité de la paroisse de Léognan. Mais, au lieu-dit « La Lobeyra » (La Louvière), l’homme avait défriché une vaste clairière et s’était lancé dans la grande aventure viticole. La production était à cette époque encore réduite, de l’ordre de quelques dizaines de barriques, mais la qualité des vins produits était déjà reconnue. La famille de Guilloche, d’ancienne bourgeoisie anoblie par les charges, présidait alors à la destinée de ces lieux, depuis 1398. Son implication dans la vie politique de la cité bordelaise, au sein du Parlement, fut indéniable et ce pendant plus de deux siècles.
Entre 1510 et 1550, Pierre de Guilloche, puis son fils Jean, se lancèrent dans de vastes opérations foncières : achats, échanges de parcelles se succédèrent. Ces importants remembrements autour de la maison noble de La Louvière, semblable alors à un modeste castel orné de plusieurs tours, furent à l’origine du domaine que nous connaissons aujourd’hui. En cette première moitié du XVIe siècle, à l’instar de la famille de Guilloche, plusieurs parlementaires bordelais donnèrent naissance aux grands crus actuels. De confession protestante, les de Guilloche endurèrent plusieurs vagues de persécutions dans les années 1572 et leur bien de La Louvière fut, à maintes reprises, mis à sac.
Héritière de la maison de Guilloche, la dame de Roquetaillade vendit la Louvière en 1618 à Arnaud de Gascq, abbé commendataire de l’abbaye de Saint-Ferme. Mais, incapable de remettre en état cette propriété, ce dernier en fit don le 28 avril 1620 à la Chartreuse Notre-Dame de Miséricorde de Bordeaux. Tous les soucis de restauration du domaine et de son exploitation reposaient désormais sur les moines de la Chartreuse. La grande rigueur de cet ordre religieux et une gestion des plus méticuleuses vinrent rapidement à bout de la plupart des problèmes rencontrés jusqu’alors. La Louvière revivait enfin ! Bénéficiant en ce début du XVIIe siècle d’une conjoncture particulièrement favorable au développement de l’activité viticole, nos religieux apportèrent une attention toute particulière au vignoble. Dans les chais, tonneliers et maîtres de chais ne ménageaient pas leurs efforts et prodiguaient les meilleurs soins aux vins blancs et rouges, très prisés des marchands picards, anglais et flamands. Chaque année, plusieurs dizaines de barriques de vin rouge de La Louvière étaient ainsi embarquées sur des navires en direction de l’Angleterre ; les blancs partaient vers le Nord de l’Europe. Au XVIIIe siècle, les vins produits par les Chartreux étaient parmi « les plus excellents qu’on puisse boire dans tout le royaume ». Maîtres de la Louvière pendant près de deux siècles, les Chartreux en furent dessaisis au moment de la tourmente révolutionnaire.
En novembre 1789, l’Assemblée Nationale confisqua les biens du clergé. Déclaré « Bien national » , le domaine de La Louvière fut mis en vente au printemps 1791. Le vignoble s’étendait alors sur une quarantaine d’hectares. Les enchères furent remportées par un négociant bordelais, Jean-Baptiste Mareilhac. A la tête d’une des maisons de négoce les plus prospères de Bordeaux, Jean-Baptiste connaissait bien La Louvière dont il exportait une partie des vins vers Saint-Pétersbourg. Cette propriété était donc pour lui un très bon investissement.
Mais une seule chose manquait encore à son bonheur : une demeure digne de sa jeune épouse Jeanne-Emilie. Pour cette grande entreprise, il fit appel à un architecte de renom, François Lhôte, ancien élève de Victor Louis, auteur du Grand Théâtre de Bordeaux. La vieille maison et ses vestiges moyenâgeux laissèrent la place à une belle bâtisse dans le plus pur style néo-classique. Pour la décoration intérieure, il sollicita un de ses amis, François-Louis Lonsing, peintre d’origine flamande de grand talent. Celui-ci réalisa les grisailles et les plafonds du salon rotonde sur le thème des amours Psyché. Mais victime d’un empoisonnement dû au maniement de pigments toxiques, cet artiste ne put achever ses travaux et mourut à La Louvière au printemps 1799.
La nouvelle demeure fit l’admiration de tous. En 1946, le site fut inscrit à l’Inventaire des Monuments Historiques et fut classé en 1996. On retient que la famille Mareilhac présida à la destinée du domaine pendant une grande partie du XIXe siècle. Alfred Mareilhac, petit-fils de Jean-Baptiste hissa le vignoble de La Louvière parmi les vignobles les mieux tenus du département et obtint pour ces fabuleux résultats une « médaille d’or » décernée par le Ministère de l’Agriculture en 1869.
En 1911, Alfred Bertrand-Taquet, parisien d’origine, actionnaire de la « Revue Vinicole » acheta le domaine et en assura la gestion jusqu’en 1944. Il fut élu maire de Léognan en 1919 et le resta jusqu’au lendemain de la seconde guerre mondiale. Victime de l’absentéisme de ses propriétaires, la Louvière joua par la suite,les belles endormies pendant plus de quinze ans.
Enfin, en 1965, André Lurton, viticulteur originaire de Grézillac tomba sous les charmes de La Louvière et s’en rendit acquéreur. Les années qui suivirent, virent ce domaine retrouver peu à peu son prestige d’antan… La demeure fut entièrement restaurée et le vignoble reconstitué…
texte d'après André Lurton Site André Lurton :