Connaissons-nous notre église? par Joseph Boyreau ( 1993)
Saint Morillon ne possède guère qu'un seul monument ancien, son Eglise. Puisque la voici ravalée, et rendue à sa splendeur première, n'est-ce pas l'occasion de la visiter ou de la revisiter?
L'habitude rend les choses banales. Nous passons devant notre Eglise sans la voir ... Elle fait cependant partie de notre mémoire collective. Mais, en fait, depuis quand?
Il faut faire un bond en arrière de 800 à 900 ans. Notre Eglise remonte aux XIèmeet XIIème siècles. Elle est donc romane pour son choeur et son chevet ainsi que pour la nef principale.
Les nervures des voûtes latérales indiquent qu'elles sont gothiques, aux environs du XIVème siècle. Quant au porche, il serait de beaucoup postérieur sans que l'on puisse lui fixer une date.
Connaissez-vous ses principales curiosités?
Pour l'extérieur, le clocher est caractéristique d'une partie de la région: plat, triangulaire, percé de deux ouvertures pour les cloches. Simple mais bien équilibré.
Le chevet, bien mis en valeur par le ravalement comporte de fines colonnettes et à la base du toit des sculptures intéressantes : trois figurines dont une d'homme en train de boire à même la bouteille, une femme et un être vu à la fois de face pour son buste et de dos pour la partie inférieure de son corps ... Un peu plus loin une barrique. Peut-être a-t-elle donné au sculpteur l'idée du premier des personnages ? Mais sans doute la vigne était-elle déjà présente à Saint Morillon. Ce chevet a bientôt près de 800 ans.
A l'intérieur.
Il faut s'arrêter au retable dominant l'autel. Du au talent d'un artiste bordelais, Pierre FOURNIER, en bois sculpté et doré, daté de 1692, il représente trois épisodes de la vie du Christ et fut payé à l'époque 500 livres. Ce retable est classé monument historique.
La chapelle de la Vierge, à gauche, et celle de St Roch à droite datent de la même époque. La statue de la Vierge remonte au XIVème siècle. Elle est une des plus belles du Sud Ouest. Quant au tableau de St Roch, SIBON le réalisa au début du XVIIème siècle.
Notons encore, un tableau de Pierre FOURNIER, à gauche en entrant, représentant SAINT MAURILLE, Patron de la commune et deux statues rustiques, en bois, près du choeur.
A droite en entrant, dans l'édifice, une petite porte à mi hauteur, en bois sculpté, datant du XVème ou XVIème siècle.
Enfin dans le mur sud, à droite au fond, les armoiries de la famille de MONTESQUIEU, signes de la présence des barons de La Brède chez nous.
Cette église si ancienne, quel a été son rôle exact. Au cours des siècles a-t-il été toujours le même ?
Son rôle a toujours été double. Bien évidemment, un rôle religieux pour les fidèles de l'Eglise catholique. Mais aussi un rôle civil.
Sachons qu'aux temps anciens, il n'y avait ni mairie, ni lieux de réunions. Représentons-nous tous les habitants se réunissant sur le parvis de l'Eglise pour décider des questions importantes. Sait-on que la nomination des collecteurs d'impôt et la nomination des syndics pour discuter des affaires communes leur était depuis toujours réservé?
C'est au prône que le curé les mettait au courant des décisions royales ou seigneuriales. C'est encore lui qui servait d'officier d'Etat Civil.
Mieux encore, l'Eglise et l'Etat étant unis, lorsqu'un nouveau seigneur succédait à son prédécesseur, tel MONTESQUIEU en 1747, il était reçu officiellement par le curé, béni, encensé et nommé en premier lieu comme Seigneur «Haut, Moyen et Bas Justicier ».
Ce rôle se maintiendra jusqu'à la Révolution. A partir de 1793, des «Maisons communes» (ancêtres de nos Mairies) seront construites. Des Maires seront élus. L'Eglise perd son rôle civil pour se consacrer à la mission religieuse.
Puis en 1802, le Concordat lie à nouveau l'Eglise et l'Etat jusqu'à ce que la Loi de séparation en 1905 vienne à nouveau rompre ce lien. Le Bâtiment de l'Eglise appartient dès lors à la commune, qui doit veiller à son entretien. Nous voici ramené au ravalement qui nous a entraîné à ces quelques mots d'histoire.
L'Eglise n'a plus de rôle politique ; l'Etat n'en a plus de religieux. Mais les voici unis dans une action culturelle dont nous admirons aujourd'hui, avec une partie de notre Eglise remise à neuf, le résultat.
Joseph BOYREAU 1993 Bulletin municipal