La Brède : église romane Saint-Jean- d'Etampes par Emilie Chenneveau

 

textes et photos par Emilie Chenneveau ( conseils de Michelle Gaborit à Julie Véchambre )

 

HISTORIQUE

Il semble qu'il y ait eu à La Brède deux églises, si on en croit certains documents anciens. L'église actuelle dédiée à saint Jean et restaurée au XIXème siècle ainsi qu’une autre petite église ou chapelle romane dont on ignore l'époque de fondation par manque d'archives. Une tradition veut qu'elle ait été fondée par le pape Clément V et elle était dédiée à Sainte Quitterie. Cette petite église existait encore au XVIIIème siècle, quelques rares offices y étaient encore célébrés et elle possédait son propre cimetière.

L’église romane remaniée au XIXème siècle et restaurée en 2000 est inscrite à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques en 1998.

 

 

 

 

 

 

ANALYSE ARCHITECTURALE

 

v PREMIERE EGLISE DES XIème ET XIIème SIECLES

Le plan de l’ancienne église est connu par une brève description dans les Comptes- rendus de la Commission des Monuments Historiques, et par un relevé de l’architecte Alaux.

L’église possédait une abside polygonale, précédée par une longue travée droite, deux absidioles beaucoup plus petites, en hémicycle ;celle du sud avait disparu pour laisser la place à une sacristie rectangulaire, ouvrant sur un transept peu saillant, et une nef unique, flanquée plus tard par deux bas-côtés de même longueur.

Le clocher couronnait la croisée.

Avec le portail du XIIème siècle, c’est à peu près tout ce qui subsiste de visible de l’époque romane, une restauration très importante ayant eu lieu au XVIIIème siècle.

 

 

MODIFICATIONS POSTERIEURES

Au XVIIIème siècle, vers 1745, il était nécessaire d’agrandir l’église devenue trop petite, on lui a donc rajouté une nef, au sud, on en profita pour reconstruire en brique la vieille voûte de bois et pour surélever l’ancien clocher roman. L’abbé Baurein nous décrit ce clocher carré, avec une charpente pyramidale et fort élevé, et il devait l’être peut être un peu trop puisqu’il s’est effondré en 1854. A la suite de cet effondrement, l’église a été presque totalement reconstruite. La façade, classée au titre des Monuments Historiques, fut également bien modifiée à cette occasion, selon les critères de « restauration » en usage sous Napoléon III.

Selon une description de Léo Drouyn, datée du 5 mai 1846, huit années avant l’écroulement du clocher, l’église présentait une abside à pans coupés, dont l’élévation est détaillée. Elle se composait de trois niveaux, séparés par des cordons. Celui qui sépare le premier du second était sculpté de rinceaux.

L’abside était renforcée aux angles par des contreforts-colonnes appuyés sur des pilastres, qui avaient un diamètre moins important au troisième niveau.

Un arc de décharge en plein cintre reposant sur de simples impostes occupait le second niveau, tandis que des arcs géminés, dont les cintres retombaient sur un chapiteau sculpté et une courte colonnette, étaient plaqués au troisième niveau.

Le couronnement de l’abside romane, et particulièrement ses modillons, semble avoir déjà disparu.

On, peut remarquer que cette élévation est bien celle de l’abside actuelle du XIXème siècle, qui reproduit les trois niveaux de la construction romane, avec ses arc plaqués, et les contreforts-colonnes, plus minces vers le haut.

Toutefois, la nécessité d’éclairer l’église a conduit l’architecte contemporain à ouvrir des baies à l’intérieur des arcs du second niveau. Le nouveau clocher vu le jour en 1864. Ces travaux, d’abord sous la direction de l’architecte Alaux, avec la collaboration du sculpteur Mora, se poursuivirent pendant toute la seconde moitié du XIXème siècle, et on peut remarquer qu’après la mort de Léo Drouyn, son fils, Léon, qui était architecte, fut un de ceux qui terminèrent l’œuvre.

En 1876 et 1897, des réparations importantes sur les voûtes et le clocher eurent lieu.

 

L’église est refaite dans un style néo-roman destiné à s’harmoniser avec celui de l’ancienne façade, et l’emploi systématique de l’arc en plein cintre règne sur l’ensemble de la construction, à l’imitation de l’ancienne église.

Comme c’était le cas dans l’édifice roman, un clocher couronne la croisée, dont le socle est flanqué par les quatre effigies monumentales, en pierre, des symboles des Evangélistes.

Ainsi cette réalisation a réellement cherché à prolonger le souvenir de l’église romane, et il en a été de même avec la sculpture. Elle illustre parfaitement l’un des aspects de la restauration des monuments anciens au XIXème siècle.

A l’époque de cette première restauration le cimetière entourait l’église.

Après la chute du vieux clocher, une réhabilitation a eu lieu au XIXème siècle.

Au cours de cette restauration, l’église a presque été entièrement remaniée, et aucun élément n’a pu être classé par les Monuments Historiques, même le portail roman, car certaines sculptures ont dû être refaites dans une pierre différente de la pierre d’origine, et cela suffit pour empêcher le classement.

 

A cette occasion l'ancien maître-autel en bois doré du XVIIème siècle a été placé dans la chapelle du château de La Brède.

Nous remarquons quelques beaux vitraux comme ce Saint Hubert très lumineux à droite en entrant, certains sont signés de la maison FEUR et datés de 1896.

 

 

ANALYSE DU DECOR

 

v FACADE DE L’EGLISE ROMANE

A l’ouest de la nef unique prenait place la façade romane que Léo Drouyn à dessiné à trois reprises le 5 mai 1846, et dont il a tiré un calque et une gravure, publiés dans le Compte-rendu de la Commission des Monuments Historiques de la Gironde.

Cette façade possède un avant corps composé de trois niveaux, légèrement saillant par rapport au mur occidental.

En, bas s’ouvre un portail en plein cintre, sans tympan, qui développe une archivolte à trois voussures, la voussure externe retombant, par l’intermédiaire de chapiteaux sculptés, sur des colonnettes géminées, les deux autres sur des colonnettes simples. Ce niveau se termine par une corniche saillante, soutenue par d’importants modillons sculptés, alternant avec des métopes, également sculptés.

Le second registre est composé de trois arcs en plein cintre, retombant sur des chapiteaux sculptés et des colonnettes. L’arc central a été supprimé pour laisser place à un oculus, mais les chapiteaux romans sont conservés.

Le troisième niveau se termine en hauteur par un fronton, brisé pour permettre le développement d’une baie en plein cintre, composée d’une archivolte retombant par l’intermédiaire de deux chapiteaux sculptés, sur deux colonnettes.

 

De part et d’autre de l’avant corps prennent place dans le mur occidental deux arcs aveugles de petite dimensions, peu ornés car leur cintre repose sur une simple imposte.

 

Selon Jean Auguste Brutails, les dispositions de la façade sont proches de celle de Loupiac(où la sculpture est quand même plus abondante et les arcs latéraux plus élevés), mais aussi de façon plus générale de celles qui, dans l’ouest de la France ont des portails surmontés d’une arcature et flanqués de deux arcs aveugles, comme c’était le cas à la Sauve Majeure, ou à Sainte-Croix de Bordeaux. Les chapiteaux bien conservés, montre des liens avec la Saintonge et peuvent avoir été sculptés dans le second quart du XIIème siècle.

 

v MODIFICATIONS

Si l’on compare les descriptions de Léo DROUYN et la façade actuelle de l’église de la Brède, on s’aperçoit que cette dernière a subi quelques modifications, particulièrement au second niveau, où l’arcature a été complètement refaite, et compte maintenant quatre arcs. Une grande partie de sa sculpture a été modifiée.

Le chapiteau double conservé au nord de la porte, couronnant les colonnettes doubles de la voussure extérieure, probablement parce qu’il présente, aux angles, deux boules sculptées en coquille qui pourraient être interprétées comme un symbole jacquaire en relation avec l’Hospital des Templiers, possession de la Sauve Majeure, qui portait assistance aux pèlerins et aux malades.

Quelques corbeilles, corbeaux et métopes sculptés provenant de l’église de la Brède sont conservées au Musée d’Aquitaine, en particulier un Samson chevauchant le lion qui provient vraisemblablement de l’arc triomphal de l’abside, au nord, car à cet emplacement le sculpteur du XIXème siècle s’est efforcé de reproduire le thème du modèle roman.

Si on fait le tour du clocher, on remarque les quatre évangélistes, représentés sous leur forme animale. Traditionnellement Saint Luc est figuré par le taureau, St Marc par le lion, l’Ange est associé à St Mathieu et l’aigle à St Jean.

L’aigle est non seulement St Jean l’Evangéliste mais aussi le Rédacteur de l’Apocalypse, car il symbolise la Révélation. L’aigle de Saint Jean d’Etampes a perdu la tête…

 

 

CONCLUSION

L’intérêt de l’édifice porte principalement sur les restes de l’architecture romane concentrée sur le portail occidental. Cependant il est intéressant de constater cet effort de vraisemblance avec le passé roman dans la volonté de reconstruire cette église au XIXème siècle.

 

 

S'inscrire à la newsletter Patrimoine *


Recherche sur le site