Eglise romane de Cadaujac:
synthèse par Pïou Lacoste (SIGM) (après relecture et avec apport personnel ) des documents produits par Emilie Chenneveau, Michelle Gaborit et Frédéric Durand .
publié dans le Journal de la Promenade (ISSN 1959-4259) vendu le 6 septembre 2009
ci-contre devant l'église, un tilleul et une glycine enlacés ( n'existent plus en 2014)
L'église Saint Pierre est un ensemble composé d'un clocher porche du XIX ème siècle adossé à une église romane à 3 nefs et terminée par un chevet complet : chœur, abside et deux absidioles ; enfin en travers, comme la barre du tau, une sacristie a été construite au XIX ème siècle dans le plus pur style éclectique de l'époque (1874) . Le clocher et la sacristie XIX ème encadrent l'édifice roman.
La partie romane est construite en appareil de petits moellons du XI ème, peut être un réemploi d'appareil gallo-romain. L'uniformité de cet appareil laisse à penser que le plan basilical de l'église est d'origine même si de petites baies romanes à linteau monolithe visibles au niveau de la première travée orientale évoquent la trace d'un premier transept. Les dernières travées occidentales, construites en grand appareil, sont plus récentes. Enfin au niveau des murs gouttereaux de la nef et des bas côtés, il est visible que l'église a été surélevée peut être à l'époque où les plafonds en pierre ont été réalisés. On sait que l'église a été agrandie et modifiée au XVIII ème et XIX ème siècle et c'est alors que les fenêtres actuelles furent percées, les contreforts anciens (en murs fourrés) arasés, des contreforts neufs montés, les corniches et les modillons du chevet refaits à neuf.
Donc nous sommes en présence d'une église romane du XI ème siècle dotée de 3 nefs. De cette époque il ne reste que les murs extérieurs, l'ensemble de la décoration et des bâtiments annexes datant XIX ème siècle. Sur le mur sud du mur gouttereau, une porte est encore visible ; nous sommes peut-être en présence de la porte des cagots (lépreux) qui pouvaient ainsi rentrer dans l'église sans se mélanger avec les autres fidèles (une hypothèse ferait du domaine de la Grâce, situé un peu au sud de l'église, une ancienne léproserie).
Comme pour de nombreuses autre églises, le XIXème siècle a déplacé les cimetières en dehors des zones construites ; ici lors du déplacement des tombes ont été découverts des sarcophages mérovingiens qui attestent la présence d’une nécropole ou d'une église antérieure au XI ème siècle. Un de ces sarcophages est encore visible dans le jardin du presbytère au pied d'un beau puits et vous pouvez le visiter en suivant.
Le clocher, que tout le monde aura reconnu comme un clocher voulu par le cardinal Donnet et construit par l'architecte Amédée Lasmolle (restaurateur des églises de Saint Morillon, Léognan), a une curieuse origine : il est dit que jusque dans les années 1454 on ne sait s'il y avait un clocher mais c'est à partir de cette date qu'un clocher mur triangulaire (un gâble avec une ou deux alvéoles pour les cloches) est érigé. Après la révolution et deux décennies d'abandon, le clocher menaçait ruine. Il fut commandé en 1823 au sieur Marandet un clocher neuf sur base carrée. Mais mal construit avec de la mauvaise pierre, il du être démoli en 1839 pour être reconstruit définitivement avec une hauteur de 33m en 1853, le tout financé par une souscription auprès des Cadaujacais. Deux cloches sont présentes, une de 1831 correspondant au second clocher et bénie par le cardinal de Cheverus et une autre de 1865 bénie par le Cardinal Donnet.
Dès l'entrée dans l'église on a la sensation d'une petite église assez basse mais attention le sol a été surélevé XIX ème siècle d'au moins 50cm...imaginons la donc un peu plus haute !
Nous avons bien cinq travées, six piliers et douze colonnes ; l’ arc triomphal sur le choeur, les culs-de-four des absides et les chapiteaux sont d'origine romane. Ces derniers ont tous été refaits ou remplacés hormis les quatre chapiteaux du choeur qui semblent d'origine. Par contre, les doubleaux, les voûtes en berceau sont du XIX° et ont remplacé une charpente et un plafond lambrissé. Ces voûtes, véritables plafonds en pierre, ont poussé sur les murs gouttereaux qui accusent aujourd'hui un fort faux aplomb.
Outre la restauration très approximative des chapiteaux romans qui font de cette église une curiosité, les peintures murales entreprises au XIX ème siècle méritent notre attention, voilà leur origine:
Pour les peintures murales, l’abbé Barreau fait appel à Ernest Paul Ricaud. Fils d’un fervent catholique qui avait fondé la maison Au chapelet d’or, cours d’Alsace et Lorraine, en 1865, on doit également à ce peintre artisan la chapelle des sourdes-muettes de Bordeaux dès 1865, l’église de Floirac en 1867, celle de L’Isle-Saint-Georges en 1868, la chapelle Margaux en 1869, l’église de Portets en 1872, de Brannes en 1873, de Hure en 1875, de Saint-André à Angoulême en 1878, de Civrac (Médoc) en 1879, etc.
Dans la nef centrale, il va réaliser à la peinture à l’huile, une « fleurette » rouge au centre de chaque pierre, ainsi qu’une décoration stylisée représentant des objets et des scènes de la vie courante ou des symboles, au-dessus des arcades.
Dans la coupole du chœur, il a peint la scène du Sauveur des hommes promettant à Saint Pierre, le Patron paroissial, les clefs du Royaume des Cieux. Mais d’autres splendeurs ornaient l’intérieur de l’église, à tel point qu’on a pu parler de « la cathédrale de Cadaujac », renfermant de très nombreux tableaux et statuettes religieuses, des lustres et autres chandeliers.
A noter sur le mur sud, la chronique historique de l’église peinte à la même époque, d’une grande richesse typographique. Cela n’est pas sans rappeler quelque peu la profusion iconographique de l’église de St Médard d’Eyrans.
Et puis bien sûr, les vitraux de Dagrand tous refaits à la même époque et selon un programme bien élaboré que nous vous proposons de découvrir, suivi de la lecture des chapiteaux, en utilisant les fiches informations disponibles sur place.